Bonheur, désir et consommation

De Le modèle M3M
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A l'arrière plan d'un modèle de société se trouve dessinée une philosophie du bonheur.

Dans le vision libérale de la sociételle se trouve implicitement une poussée vers une consommation toujours entretenue, toujours accrue, toujours suscitée, vers des produits dont l'utilité réelle devient forcément marginale et limitée.

A cette vision s'oppose celle d'un bonheur construit sur des désir limités. Celui qui désire peu est facilement heureux parce que peu lui manque. Cette seconde vision fait partie des fondements de l'approche Modèle:XMOD. Elle est renforcée au XXIème siècle par des considérations écologiques. La finitude de la planète et des ressources environnementales appelent une limitation et une stabilisation à la fois du nombre d'occupants de la planète et du volume de consommation moyen de ces habitants. Cette limitation et cette stabilisation ne peuvent être obtenues que par deux moyens. Soit l'efficacité des moyens de production est augmentée, ce qui permet de produire autant de biens, de services et d'énergie en prélevant de moins en moins de ressources. Soit on accepte de limiter les désirs à un certain niveau, et on met un terme à la spirale de besoins qui soutient l'économie libérale (dans son modèle le plus agressif et naïf). Dans la démarche Modèle:XMOD, c'est la seconde option qui est retenue, parce qu'elle considérée comme à la fois plus sage et plus réaliste.

Matérialisme rationnel, environnement et bouddhisme

[ Ceci a été écrit en 2007 par le rédacteur à l'intention de ses enfants, qu'il veut sensibiliser à une approche de la philosophie bouddhiste. ]

Le monde qui abrite la vie et nous tous est d'une complexité que nous ne pouvons cerner. Il y a diverses questions cruciales que la science laisse ouvertes:

  1. La question du déterminisme et de la causalité en général. Le modèle laplacien est il valide, ou existe-t-il quelque chose comme une énergie créatrice omniprésente dans la nature pour répondre aux "choix" qui sont ouverts ?
  2. La question des causes premières. Pourquoi le néant - simple, logique - est il remplacé par l'être - absurde, anecdotique, bizarre - ?
  3. La question des limites dans le temps et dans l'espace de l'univers. Que signifie "ailleurs" "avant" et "après" ? Si ces mots n'ont pas de sens, quelle est la nature du monde, de l'espace et du temps ? Ne sont ce que de laborieuses de formes de vie simplistes, comme les nôtres ?

Sur toutes ces questions, il est facile et naïf d'assigner un rôle à un dieu quelconque, et certainement à un dieu qui manifesterait un intérêt particulier pour une certaine espèce, présente pendant quelques instants de l'histoire sur une planète perdue parmi tant, d'une galaxie perdue parmi tant. Quel anthropocentrisme grotesque que d'imaginer que "tout cela" est fait pour une forme de vie dont la caractéristique remarquable est une conscience qui produit un orgueil démesuré !

Mais alors qu'est ce qui mérite notre respect ? Pas de divinité à respecter, pas de destin exclusif et grandiose pour nous autres. Pouvons-nous nous contenter de respecter des ancrages plus simples, plus humbles ? Quelques réponses au moins s'offrent:

  1. La matérialité du monde. Les lois de la nature, même si nous n'en avons que des approximations laborieuses s'imposent à nous comme des lois, comme des fondements que nous n'avons ni le pouvoir ni la force d'infléchir. Ce sont des approximations et des représentations imparfaites : comment concilier sinon la mécanique newtonienne, la mécanique lagrangienne, la mécanique relativiste, la mécanique quantique et leurs successeurs ? Cependant même avec les imperfections constatées, elles réduisent les champs du possible, elles imposent des évènements que nous pouvons prédire et devons constater.
  2. La vérité. La vérité est-elle autre chose au départ que la rencontre entre la matérialité et le langage. Dans les limites du monde objectif, se soumettre à la vérité, c'est permettre à notre langage de se conformer aux réalités matérielles. Et pour le discours subjectif, l'ambition de la vérité est calquée sur celle de l'objectif. Il s'agit de mettre en adéquation le discours tenu avec toutes les informations accessibles à nos sens et à notre conscience.
  3. La vie. Au sein du monde matériel, la vie occupe une place particulière. Non seulement le niveau d'organisation des structures vivantes est d'un ordre de grandeur supérieur à celui de tout ce qui l'entoure, mais surtout les structures vivantes sont tombées dans le piège irréversible de l'évolution sélective. Les structures qui se reproduisent plus, plus vite, mieux, s'imposent inévitablement à celles qui par hasard sont moins compétitives sur ce plan, et ce jeu aveugle mène à des formes de vie performantes, telles que la nôtre, que l'on s'égare à imaginer sur-performante. La vie nous a engendrés, c'est une mère subtile et aveugle. La respecter elle, c'est surtout respecter nous, nos origines, notre histoire. Les algues, les mouches, les méduses et tous nos autres cousins ne méritent pas moins de respect.
  4. La santé. La santé des espèces vivantes, celle de notre descendance, celle des espèces environnantes n'est en fait que l'expression de la vie aboutie. Qu'il s'agisse de santé mentale ou physique, elle mérite de passer du statut de talent au statut de vertu respectable.

Le monde matériel et ses lois, la vérité du discours, la puissance aveugle de la vie, la santé de cette vie, voilà le mieux que nous puissions respecter, admettre et peut-être admirer. Mais comment ? De ce qui précède pouvons-nous tirer des règles de vie qui nous permettent d'être cohérents et respectueux, de vivre en paix avec nous-mêmes ?

Voici quelques règles suggérées:

  1. Toute forme de vie doit être respectée. Qu'il s'agisse de végétaux ou d'animaux, la vie doit être préservée autant que possible dans sa diversité et dans son abondance. Supprimer la vie pour le plaisir est un acte irrespectueux. Il n'est permis de supprimer la vie que dans la mesure où c'est nécessaire à la bonne santé d'une autre forme de vie (la nôtre, par exemple), et seulement dans la mesure où ce prélèvement n'a pas d'incidence forte sur un écosystème ou sur une biodiversité.
  2. L'environnement, qui englobe toutes les formes de vie, mais aussi les biotopes dans lesquels se reproduisent ces formes de vie, doit également être respecté et préservé. Là où notre espèce provoque ou a provoqué des dégâts dans un écosystème, il s'agit de le réparer et de le reconstituer. Dans bien des cas, il serait souhaitable que le périmètre d'occupation et d'invasion des homo sapiens soit limité, réduit, reculé, et ceci ne devrait pas être limités à des zones nommées "parc naturel". L'ensemble de la planète Terre peut être considéré comme un vaste "parc-planète naturel".
  3. L'envahissement toujours plus insatiable de la planète par les homo sapiens est l'expression d'une insatisfaction permanente, d'une demande toujours plus forte d'espaces, de produits, de services qui détournent au bénéfice d'une espèce les ressources planétaires. Il y a là un écho de l'esprit de consommation effrénée qui entoure l'homo très consumens et pas du tout sapiens. Paradoxalement, les individus qui nous entourent ne tirent pas de cette spirale de besoins successifs un épanouissement personnel crédible. Il semble au contraire que l'insatisfaction de tous grandisse proportionnellement à la mise à disposition de biens sophistiqués. La civilisation qui nous lie est celle du désir, de l'impatience, de l'insatisfaction et de la frustration. Cette spirale est tout l'opposé de ce que réclame notre environnement : une stabilisation, voire un recul de l'omniprésence de l'homo sapiens.
  4. Le renoncement semble donc non seulement la voie de la sagesse, mais beaucoup plus simplement celui du bonheur et de la sérénité. C'est en étant capable de nier les besoins qui nous sont injectés de force que nous pouvons retrouver notre liberté et notre équilibre, mais aussi peut-être une relation saine aux biotopes qui nous hébergent.

On constate que ces règles sont en ligne avec certaines préoccupations première de la philosophie bouddhiste. Il n'est pas question de vénérer une divinité bouddhiste plus qu'aucune autre, nous n'en avons pas besoin. Il s'agit seulement de constater que ces règles correspondent à une philosophie de vie vieille de 2600 ans, et qu'elles peuvent contribuer à un équilibre dont l'homo sapiens du XXIème siècle et sa planète ont un urgent besoin.
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