Gauss, golf et ellipsoïdes d'incertitudes

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Introduction

Les travaux de Carl Friedrich Gauss et en particulier le concept de distribution normale sont parmi les plus féconds et les plus omniprésents dans notre environnement, car ils reflètent de la manière la plus usuelle l'intervention du hasard ou de l'incertitude dans notre vie.

Peut on trouver de la beauté dans ces abstractions mathématiques, dans ces géométries porteuses de sens ? J'avoue être de ceux qui admirent l'élégance des concepts formels, et celle-ci est parmi mes préférées. Math et golf

Il y a beaucoup d'interférences mathématiques dans le golf.

  1. Les systèmes de scores imaginés par les golfeurs sont ingénieux, mais d'une vaine complexité qu'un mathématicien apprécie peu. [nota :pour ma part j'ai mis au point et j'utilise la méthode floue des QHE [quick handicap estimator], qui est à la fois plus souple à utiliser et plus rigoureuse].
  2. La trajectoire des balles obéit aux règles habituelles de balistique. On y trouve des paraboles, mais affectées par de nombreux facteurs volontaires et involontaires. Il y a d'abord les effets de frotement de l'air qui déforme à l'évidence la parabole gravitationnelle théorique. Il y a aussi le vent, la pluie et la température. Il y a encore les effets subtils dus à la rotation de la balle, involontaires pour la plupart des golfeurs, objet de leur habileté pour les meilleurs d'entre eux.
  3. L'incertitude sur le point d'impact et le point d'arrêt de la balle frappée est une mesure inverse de l'habileté du golfeur. C'est ici qu'interviennent Gauss et sa distribution normale, et c'est l'objet de la suite.

L'incertitude sur le point d'impact

Prenez un fer sept (par exemple), et tapez un très grand nombre de balles identiques, puis observez leur points d'arrêt au sol. Si vous étiez un golfeur parfait, c'est à dire pratiquant un mouvement parfaitement répété et identique à chaque frappe, toutes les balles se retrouveraient exactement au même endroit, aux effets minimes près du vent, de la poussière sur le club et la balle, etc...

Mais vous êtes imparfaits, et tous les joueurs de golf, même les meilleurs sont imparfaits. Vos balles arrivées au sol forment un amas distribué autour de la cible. Elles sont trop longues ou trop courtes, trop à gauche ou trop à droite. Mais quelle est la distribution de densité des balles au sol ? Il faut imaginer ceci pour un nombre considérable de balles.

La réponse est grosso modo une distribution normale bi-variée - une distribution quasi gaussienne. Elle est bi-variée parace qu'elle s'étend sur deux dimensions. Il y a un centre, qui correspond par exemple à un drapeau ciblé. De manière générale, notre normale bi-variée présente la forme d'un chapeau, dont le sommet est le centre, présentant un bel arrondi autour du centre, et une périphérie tendant vers l'horizontale. Le dessin ci-dessous donne une idée de cette distribution.

Fichier:Normale2.png

En chaque point du sol, la hauteur du chapeau reflète la densité de probabilité de présence de balles. Bien entendu le chapeau de Tiger (TW, archétype du bon joueur) est bien plus étroit et plus pointu que le vôtre et surtout que le mien. mais l'ensemble du volume caché sous le chapeau est toujours égaé à 1, parce que la probabilité globale que la balle retombe "quelque part" est bien égale à 1 (en termes matheux: l'intégrale sur la surface de la fonction de densité de probabilité est toujours égale à l'unité).

On peut se poser des questions proches, et plus instructives. Par exemple: "Quelle est la limite de la surface du terrain ou tombe la balle avec une probabilité de 90% ?". On peut poser la même question avec 50% ou 99%. Si on ajoute comme conditions que cette surface doit limiter une zone présentant un minimum de densité de probabilité, alors on obtient des ellipses. Ce sont ces ellipses que j'appelle "ellipsoïdes d'incertitude" - EI.

Reprenant la représentation du chapeau, les EI-99%, EI-90% et EI-50% peuvent être imaginées comme des coupes horizontales dans le chapeau. Et le volume qui est déterminé comme interne à ces ellipsoïdes (les frontières étant verticales) est de 0.99 0.90 et 0.50, pour respectivement les trois ellipsoïdes pris comme exemple.

Votre ellipsoïde d'incertitude à 99% est vaste, bien plus grand que votre EI à 90%, qui est plus grand que celui à 50%. Par ailleur l'EI-90% de TW est probablement plus petite que la vôtre. On pourrait par exemple supposer que l'EI-99% de TW a la même taille que votre EI-90%, Ce qui signifierait que dans le périmètre où vous êtes capables de déposer 90% de vos balles, TW est capable de déposer 99% des siennes.

[... image ...]

Imperfections

En réalité le nom ellipsoïde doit être utilisé au lieu d'ellipse pour de multiples raisons. L'ellipsoïde ressemble à un ellipse, mais dans le cas de la densité de probabilités des balles de golf frappées, il s'en écarte pour plusieurs raisons.

  • D'abord la partie distale (loin du joueur) s'étire plus que la partie proximale, et différemment. Ceci peut être attribué, au moins en partie, aux effets de topping plus ou moins prononcés. Ceci est en partie et imparfaitement compensé par les effets de frottement ralentissant les balles longues.
  • En suite, la dispersion latérale est une dispersion angulaire, et non une dispersion de distance. Il s'ensuit que l'incertitude latérale est plus étendue pour les coups trop longs que pour les coups trop courts.
  • Enfin, se superposant à l'effet précédent, les effets d'un trajectoire tournante - volontaire ou involontaire - se traduisent également par une incertitude latérale amplifiée pour les coups en fonction de leur longueur, et plus que proportionnellement à celle-ci.

Pour toutes ces raisons, l'EI est une ellipse déformée, comme l'indique le dessin ci-dessous.

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Application tactique

Bien entendu, tout ce qui précède peut paraître inutilement abstrait. Les bons joueurs de golf n'ont pas besoin d'avoir un diplôme de mathématiques avancées pour jouer infiniment mieux que vous et moi.

Cependant, il faut souligner qu'un bon joueur de golf résout avec son instinct des problèmes mathématiques très raffinés, et que des mathématiciens traitent dans d'autres domaines régulièrement:

Lorsqu'un coup de putter est joué, tout joueur de golf traite implicitement une équations aux dérivées partielles : celle qui détermine la trajectoire d'un objet roulant sur un surface plus ou moins roulante en chaque point, et pourvue en chaque point de pentes d'orientations diverses. Un bon mathématicien et un bon ordinateur bien programmé pourraient recevoir toues ces données et déterminer une trajectoire "parfaite", une direction et une vitesse d'impact optimaux, et le coup résultant serait certainement excellent. Mais un bon golfeur traite toutes ces données avec ses sens de manière terriblement efficace également. Il se sert surtout de la vue et de l'équilibre, qui lui permet de décoder les pentes grâces aux entrées combinées de ses oreilles et de ses yeux. Il se sert aussi de son expérince, qui lui permet du décoder de manière plus précise les données du problème. Le résultat est impressionnant, mais le problème dans sa nature est bien matheux.

De même lorsqu'un bon joueur envoie une longue balle dans l'air, il résout un problème complexe de balistique, où interviennent la température, le vent, et pour certians des effets intentionnels transmis à la balle lors de l'impact. Un chien est capable d'attraper au vol une balle, et donc de prédire avec une précision payante une trajectoire parabolique. Le bon golfeur traite de la même manière un problème plus complexe. mais dans un cas comme dans l'autre, ce sont les sens développés du chien et du golfeur, combinés à leur expérience, qui permettront de résoudre de problème matheux.

Mais le problème le plus intéressant est celui dont l'énoncé serait : "Étant donné la taille de mon ellipsoïde d'incertitude, quel point dois-je viser ?" Sur quel point faut-il centrer l'ellipsoïde d'incertitude. D'abord il faut prendre en compte divers facteurs:

  • le décalage entre point d'impact et point d'arrêt de la balle, la manière dont la balle est susceptible de rouler.
  • la présence d'obstacles (bunkers et obstacles d'eau)
  • les pentes du terrain

Voici différents cas où l'on imagine qu'un bon et un moyen joueur veulent centrer leurs EIs respectifs. Comme on le voit, la réponse est différente. Elle peut même être très différente.

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Conclusion

Lorsque je joue au golf, que je le veuille ou non, je matérialise visuellement les proportions de mon EI. Ensuite, je m'efforce de contrer au mieux l'EI, en tenant compte de facteurs tactiques, et en particulier du niveau de risque toléré ou demandé. Ensuite seulement, j'estime une direction et une distance, et je prépare mon coup. A vrai dire je ne saurais penser autrement... Qu'en pensez-vous ?

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